Quel fromage pour raclette ?
La fondue n’est pas la seule façon pour les Suisses d’apprécier le fromage fondu. Bien qu’elle puisse être préparée toute l’année et qu’elle soit encore associée aux dîners d’hiver au coin du feu dans les régions de montagne, lorsque les beaux jours arrivent, les Suisses préfèrent se réunir autour de la raclette, un rituel né au cœur des montagnes et désormais synonyme de fête.
La raclette est en fait le nom d’un fromage spécifique du canton du Valais bénéficiant d’une appellation d’origine protégée (AOP), qui, par association, définit également la manière dont il est préparé et consommé. Bien qu’un menu à base de fromage fondu puisse sembler lourd, la raclette est beaucoup plus légère que la fondue, c’est pourquoi de nombreux Suisses la réservent pour l’été.
Fromage à raclette, pure essence alpine
La situation géographique du Valais (Wallis en allemand), situé au sud du pays et entouré de chaînes de montagnes, offre au canton des conditions idéales pour la fabrication du fromage. Le climat et la flore alpine locale dont se nourrissent les vaches locales font partie de son secret et de sa marque de fabrique, donnant au lait ses caractéristiques uniques.
En 2007, un accord entre la Suisse et l’Union européenne a approuvé la création de l’appellation d’origine Raclette du Valais (AOP) pour protéger et certifier l’authenticité des fromages qui respectent le cahier des charges associé.
On sait que le lait était produit dans la région dès les Romains de l’Antiquité et que des fromages primitifs étaient fabriqués dans la région, apparemment très appréciés, même s’ils n’avaient pas grand-chose en commun avec la raclette d’aujourd’hui. Au cours du Moyen Âge, la production s’est spécialisée et a même été utilisée comme moyen de paiement entre le 14e et le 19e siècle, époque à laquelle les premières technologies de fabrication du fromage suisse ont été développées.
Le fromage à raclette tel qu’on le connaît aujourd’hui ne prendra forme qu’au XIXe siècle. Aujourd’hui, les fromages sont toujours fabriqués selon l’ancienne recette et en respectant le même processus de production, adapté aux technologies les plus avancées.
La raclette est un fromage extra gras à pâte mi-dure fabriqué à partir de lait cru de vache des races Eringer, Braunvieh, Simmentaler, Red-Holstein et Schwarzfleckvieh. Chaque fromage est estampillé sur la croûte après sa formation dans la presse, puis soumis à un bain de sel. Une grande partie de l’eau est éliminée et la croûte commence à se former.
La raclette est un fromage au lait cru de vache bénéficiant d’une appellation d’origine protégée.
La dernière étape est la maturation des meules dans les caves pendant trois à six mois. Ce temps est crucial pour le développement de tous les arômes et saveurs de chaque fromage, avec des nuances différentes dans chaque fromage individuel grâce à la variété et à la richesse de la flore alpine. Pendant cette période, les maîtres fromagers surveillent et soignent méticuleusement le processus pour en contrôler la qualité.
Il en résulte des fromages en forme de roues plates, d’environ 35 cm de diamètre et 7 cm de hauteur, pesant environ 6 à 8 kilos. Semi-dure, avec une croûte rugueuse comestible, la pâte est claire et crémeuse, avec à peine des yeux et un arôme doux avec des notes d’herbes et de fleurs. C’est un fromage très gras qui fond particulièrement bien et qui convient aux personnes intolérantes au lactose.

Du fromage à la raclette
Quand les gens ont-ils commencé à faire fondre le fromage avant de le manger ? L’origine de cette coutume n’est pas claire. Comme tant d’autres, son origine est associée à la survie pure et simple lorsque la vie était beaucoup plus difficile, notamment dans les montagnes rudes.
On pense que ce sont les bergers alpins qui ont commencé à se réchauffer en faisant fondre le fromage directement sur le feu, pour l’accompagner de pain ou de ce qu’ils avaient à ce moment-là. La légende veut que ce soit un vigneron appelé León qui ait inventé ce plat lors d’une froide nuit d’hiver, bien que des sources écrites certifient cette coutume dès le XVIe siècle.
En tout cas, la tradition de le faire fondre est même antérieure à son identification à un fromage spécifique. De nombreux récits de voyageurs font état de la coutume valaisanne de manger du fromage fondu entre le XVIIe et le XIXe siècle, époque à laquelle on pense que le terme « raclette » devait être bien connu.
L’origine de l’expression est associée au français provençal, lié au verbe racler, « gratter ». En 1874, le terme est lié au fromage même produit dans la région et utilisé à cette fin. Au début du XXe siècle, il est déjà devenu un signe d’identité des habitants de la région et, en 1909, il est présenté à l’Exposition cantonale de Sion comme « le plat national de la Wallonie ».
Comment préparer et servir une raclette suisse : de la montagne au foyer moderne
Il existe actuellement trois méthodes pour préparer une raclette à la suisse. Les deux premières relèvent davantage du rituel traditionnel, consistant à couper les meules de fromage en deux ; la troisième est une variante moderne adaptée aux cuisines des particuliers.
Raclette sur le feu
Les puristes affirment que c’est la seule façon authentique de profiter pleinement d’une raclette, bien qu’aujourd’hui il s’agisse plus d’une idée romantique qu’autre chose, car il est très difficile de vivre l’expérience. Il est censé être le système original et traditionnel, faisant fondre le fromage directement par l’action d’un feu de bois.
Raclette en copeaux
C’est le système le plus utilisé dans la restauration, mais aussi dans les foires en plein air, les festivals ou par tout amateur qui veut reproduire chez lui l’expérience la plus authentique. Le fromage est à nouveau coupé en deux, en plaçant les morceaux sur un dispositif métallique qui applique la chaleur directement sur la coupe, remplaçant les flammes du feu.
Raclette domestique
D’invention plus récente, ces appareils ne permettent pas de racler le fromage. Il s’agit d’appareils électriques, rectangulaires, carrés ou ronds, dans lesquels sont insérés de petits plateaux individuels dans lesquels sont placées des portions de fromage. La chaleur produite à l’intérieur fait fondre le fromage, ce qui permet à chaque convive de se servir à sa guise au fur et à mesure. Ils sont généralement dotés d’une plaque, d’un gril ou d’une pierre sur le dessus pour la cuisson d’autres aliments tels que les légumes ou le pain grillé.
Raclette fondante
La raclonette domestique est devenue si populaire qu’il est rare qu’une famille suisse n’en possède pas une, associée à la fondue dans le placard. Cependant, les plus grands défenseurs de ce plat valencien le renient, car il ne permet pas de profiter pleinement de l’expérience gastronomique authentique.
Dans une raclette traditionnelle, le fromage est ouvert pour chaque occasion, offrant un maximum de saveur et toutes ses qualités, qui commencent à se détériorer dès qu’il est découpé en portions. Bien que vous puissiez vous rendre dans un magasin de fromage et leur demander de couper sur place les portions de raclette souhaitées, il est habituel d’acheter des emballages commerciaux où les tranches sont déjà emballées.
Et il y a une autre caractéristique unique que la raclonette ne pourra jamais imiter : le grillage de la croûte. En appliquant une source de chaleur aussi forte directement sur la coupe de la meule, la croûte fond, brunit et grille, devenant croustillante et offrant une saveur intense très appréciée. C’est un peu comme le socarrat de la paella et on le surnomme religieux, « religieux » ou « nonne ».
Le rituel de la raclette : comment la servir et comment la servir avec elle
Un menu raclette dans un restaurant traditionnel commence généralement par une dégustation de produits locaux, une assiette valaisanne avec des saucisses du Valais, bien que cela ne soit pas obligatoire. Le pain est servi à table – du pain des Alpes, avec une bonne mie et une croûte savoureuse, avec peu de poches – et le festin commence, sans hâte. Le fromage est chauffé petit à petit dans la cuisine ou dans un endroit bien en vue du public, et le cuisinier gratte les portions au fur et à mesure qu’il fond.
Un couteau racleur spécial est utilisé à cet effet, et la pointe exacte du fromage est déterminée par le chef, le maître et le spécialiste. L’idéal est d’avoir une bonne quantité de croûte croustillante, mais cela s’accentue au fur et à mesure que la soirée avance.
Chaque portion de fromage fondu est servie dans des assiettes individuelles qui sont apportées à la table, et le rituel se poursuit jusqu’à la fin de la séance, qui comprend généralement cinq ou six portions. À table, les convives complètent leur assiette avec du pain ou des accompagnements typiques. La quantité estimée est de 200-250 g de fromage par personne.

À la maison, le processus devient plus communautaire et prend des connotations plus festives. Dans un restaurant, il est courant de partager une raclette à deux, mais à la maison, elle est plutôt associée aux fêtes de famille ou entre amis, comme la fondue. Elle est réservée aux vacances ou aux jours fériés, car une raclette se déguste sur de longues journées où il n’est pas nécessaire de se presser.
La table est remplie de plats et d’accompagnements, le fromage est déjà coupé et la raclette commencée à l’avance, pour qu’elle puisse chauffer. Chaque convive est responsable de sa propre casserole, et il faut faire très attention à ne pas en abuser. C’est un processus continu et ininterrompu : le fromage fraîchement fondu doit être mangé immédiatement, il ne peut pas s’accumuler dans l’assiette.
Et en parlant d’accompagnements, les trois plus typiques et essentiels ne peuvent manquer :
- Des pommes de terre bouillies. Ils sont une institution dans toute la Suisse et sont considérés presque comme un plat à part entière. Accompagnant une multitude de plats, ils sont incontournables lors d’une raclette ou d’un barbecue. Petits, arrondis, ils sont servis avec la peau, bien que celle-ci puisse être enlevée.
- Cornichons ou cornichons. Mariné, aigre-doux, parfois épicé ou assaisonné de graines de moutarde.
- Oignons de printemps. L’autre grand cornichon que les Suisses adorent.
Les légumes frais sont un ajout facultatif à la table, surtout pendant la saison estivale. Les tomates sont très populaires en été et sont parfois accompagnées de légumes grillés ou d’autres conserves.
Pas de viande ? Si vous vous en tenez à la coutume traditionnelle, absolument pas. Le fromage est la vedette du menu et il n’y a pas besoin de jambon, de saucisses ou de quoi que ce soit d’autre. Si la paella aux saucisses est controversée en Espagne, il y a plus d’un Suisse qui criera au ciel à la vue d’une table à raclette pleine de saucisses.
Bien sûr, les nouvelles générations sont plus ouvertes d’esprit et vous pouvez voir de la viande dans des lieux destinés aux touristes ou ayant une présence plus internationale. Les Allemands ont tendance à ajouter une sélection de viandes salées à leurs raclettes – et les Espagnols aussi, bien sûr.
La touche finale est le poivre noir fraîchement moulu, mais attention : goûtez toujours la première portion de fromage sans ajouter autre chose. Si vous êtes invité à une vraie raclette, il peut être mal vu de sauter cette étape. D’autres garnitures sont acceptables dans des contextes plus informels, comme une touche de paprika ou des mélanges d’épices.
En ce qui concerne les accords culinaires, il est traditionnel d’accompagner la raclette d’un vin blanc frais, si possible un vin jaune du Valais. Un rosé est également acceptable, mais le vin rouge n’est pas très apprécié, même lorsqu’il est préparé en hiver.

Par curiosité, on le servait autrefois avec du thé chaud pour les enfants, car on disait que l’eau ou toute autre boisson froide était mauvaise pour l’estomac lorsqu’elle était associée au fromage fondu. Le vin, parce qu’il contenait de l’alcool, ne comptait pas – c’est du moins ce qu’on disait en guise d’excuse.
Au-delà du rituel traditionnel, rien ne nous empêche de déguster une raclette ou le fromage fondu homonyme comme bon nous semble. La raclette, en effet, peut être consommée telle quelle, coupée en tranches et servie en apéritif ou en entrée avec d’autres fromages locaux, ou comme ingrédient dans d’autres plats. Grâce à sa fabuleuse capacité de fonte, il est idéal pour les gratins de légumes, de viande ou de pâtes, ainsi que pour les sandwichs.
Dans les foires et les festivals en plein air, le fromage fondu est souvent servi sur de petites barquettes en carton, comme les saucisses grillées typiques, ou directement sur des pommes de terre bouillies et ouvertes. Il est également de plus en plus fréquent de trouver des étals qui le servent sur du pain, comme un grand toast, ou dans des sandwichs avec d’autres ingrédients.
L’obsession d’innover et de proposer des idées attrayantes aux nouvelles générations a même conduit les Suisses à ajouter d’autres ingrédients à leurs petits poêles à raclette. Il suffit de garnir la portion de fromage de ce que vous voulez, en le laissant griller et fondre avec le fromage : tomates cerises, jambon, courgette, les cornichons eux-mêmes… C’est un fromage très polyvalent.